Deux chemins se croisent au Parc (pv Sonohara)

Il avait enfin pu prendre le temps de se soigner. En effet, ayant entrepris de le faire adossé au mur du magasin d’Urahara, mais c’était sans compter l’arrivée inopinée d’un jeune garçon à l’apparence plutôt féminine s’étant présenté sous le nom de Hana Tendô. Cet individu que cheveux bleus qualifierait d’hyperactif l’avait provoqué en duel et montré sa force assez élevée pour pouvoir faire un trou dans le mur. Kazuo, affaibli physiquement, avait dû sortir son sabre pour en finir et – enfin – pouvoir se soigner. Il l’avait fait un peu plus loin, adossé à un bâtiment juste à côté de la boutique devant laquelle cette petite querelle avait eu lieu, et s’était à peu près bien soigné et commencé à retrouver sa force initiale. En poussant un léger soupir de soulagement, il s’était alors levé et avait regardé autour de lui pour voir si un autre énergumène allait émerger d’un coin sombre pour lui fondre dessus comme un rapace, de la même manière que l’avaient fait les récents adversaires du jeune Kiriyama qui n’avait jusque là demandé qu’à se guérir et qui n’y était parvenu que maintenant… Il avait alors débarrassé le plancher de cet endroit pour aller dans une direction dont il n’avait initialement pas la moindre idée…

… et se retrouva ainsi au Parc de Karakura. Curieusement, cet endroit lui rappelait un vague souvenir, mais il n’arrivait pas encore à mettre la main dessus… Tout ce qu’il savait, c’est que les circonstances de la première fois qu’il y avait mis les pieds l’avaient mis dans une situation assez spéciale. Il se demanda d’ailleurs… que faisait-il ici, à vagabonder dans des endroits divers de Karakura, alors que le monde était plongé dans une tension à cause d’une guerre dont il n’avait même pas encore pris connaissance de l’ampleur et des conséquences qu’elle pourrait avoir dans l’avenir… Ne devrait-il pas commencer à prendre connaissance des bas que connaissait ce monde spirituel actuellement ? Même si, maintenant qu’il était radié de la Soul Society, cette tâche allait être difficile ? Il s’était juré de retrouver Luffy pour se vider la conscience, lui raconter son histoire, comme le Vizard le lui avait en quelque sorte fait promettre… peut-être devait-il reporter ce projet à plus tard… ? Ce serait en effet préférable. Raconter son histoire à un ami, penser à sa propre petite personne, alors qu’il devait s’entraîner pour tenter au moins de participer au conflit… assez… il devait se bouger, maintenant.

Il se mit alors tout à coup à se demander qui allait lui tomber dessus… Un Shinigami ? Un Arrancar (quoiqu’il n’avait plus trop eu l’occasion d’en croiser…) ? Un Humain ? Un Vizard ? Ou alors un autre Exilé… ? Quoique s’il tombait encore sur des Envahisseurs, ceux-ci ayant quand même assez bien peuplé sa vie, ça ne le dérangerait pas tellement… Seulement, il se surprit à penser qu’il avait enchaîné en ce moment pas mal de combats et qu’il serait préférable qu’il se repose un peu… si on le laissait se reposer ! Tout en étant perdu dans ces pensées entremêlées, Kazuo continua de marcher dans le Parc de Karakura, le parcourir de long en large, faire parfois quelques petits détours, laisser son regard vagabonder de tous les côtés… Quand on regardait tout ce beau paysage, on croirait à première vue que le monde était paisible, n’avait jamais été attaqué, menacé… que jamais cette damnée guerre n’avait existé. A première vue, oui. Les esprits continuaient seulement encore à s’entre-déchirer. La raison, Kazuo ne l’avait toujours pas trouvée, et il fallait d’ailleurs qu’il la trouve, un jour ou l’autre.

Tout à coup, il sentit alors ce qu’il devait bien sentir à un moment ou à un autre. Et ce reiatsu, il ne put l’identifier. Il allait encore rencontrer quelqu’un qui lui était inconnu… Il espérait seulement que cette rencontre ne lui serait pas une nouvelle fois hostile. Mais il se dit également que puisque c’était une personne inconnue, si c’était un Shinigami, Exilé, Arrancar ou Vizard, peut-être pourrait-il recueillir des renseignements quelconques sur la guerre qui tendait ainsi le monde spirituel ? Oui, sans doute… Mais il ne savait pas encore si cette rencontre allait encore se solder par un combat… Enfin, après tous ceux qu’il avait faits, un peu plus, un peu moins, cela n’apporterait pas un si énorme changement dans sa vie… Et puis, maintenant qu’il était guéri… Ce fut à ce moment-là qu’il réalisa que le reiatsu qu’il sentait n’était pas si dense que ça… En effet, cette énergie spirituelle lui indiquait la présence d’un individu qu’il pourrait élever à peu près au même niveau que Katsuo, avait qui il avait pu avoir l’honorable occasion de faire connaissance, quelques instants plus tôt. Et cet individu, maintenant qu’il s’était guéri, le Shinigami exilé borgne n’aurait, selon lui, plus autant de souci que les dernières fois pour s’en sortir indemne. Mais bon… tout ce qui brille n’est pas d’or, comme qui dirait. Cette quantité peu élevée de reiatsu cachait peut-être quelqu’un de costaud. Prudence est mère de sûreté…

Il arrêta alors de se poser des questions et vit enfin l’origine de cette énergie spirituelle qu’il avait pu sentir de cette distance. Une fille aux cheveux bleu-marine, un œil rouge, l’autre étant dissimulé sous un voile blanc, et pas bien grande… sans compter cet air froid qu’elle affichait sur son visage.

Il s’était tout d’abord demandé ce que cette personne faisait là, à proximité d’un cadavre, occupée à cueillir des champignons et de la moisissure… mais il finit par se dire que cette activité avait un but précis. Cette fille ayant un reiatsu de nature Shinigami devait appartenir à une certaine division. Une division dans laquelle faire ce genre de cueillette était nécessaire pour y grimper des échelons. Il put d’ailleurs voir qu’elle l’avait regardé. Elle ne lui avait jeté qu’un regard furtif, même il crut comprendre par la suite qu’il n’existait déjà plus pour elle, au moment exact où elle avait détourné son regard de sa personne pour se concentrer derechef sur sa récolte. Kazuo, nullement froissé, bien au contraire, ne répondit rien, n’afficha aucune émotion sur son visage balafré… ne broncha même pas. Cette personne lui était déjà apparue froide au premier abord, alors il ne serait jamais le premier à s’étonner d’un tel comportement. Il ferma néanmoins doucement les yeux et haussa les épaules d’un geste nonchalant des clavicules, puis s’approcha doucement de cette Shinigami – il pouvait en effet se permettre maintenant de lui donner ce nom.

Il couvrit toutefois prudemment la distance, restant sur ses gardes et surveillant le moindre des gestes de cette fille. Apprivoiser un chat qui sort les griffes n’est jamais bon, comme qui dirait… Malgré tout, il ne s’approcha pas de cette personne comme s’il s’agissait d’une bête sauvage, il fallait être un minimum lucide et raisonnable… il resta bien droit pendant qu’il marchait en direction de celle-ci, une main dans la poche de son pantalon, l’autre sur la saya de son Zanpakutô, entre la sageo et la tsuba, prêt à dégainer au moindre geste hostile, tout en restant discret. Il fallait dire que cette position lui était habituelle depuis qu’il avait acquis son sabre trancheur d’âmes, et plus clairement dit, rien ne paraîtrait suspect, ou du moins, il l’espérait. Pendant qu’il pensait à tout ça, il s’était approché d’elle au moins quelques petits mètres et il ne restait plus grand-chose pour atteindre sa destination qui était se planter à un ou deux mètres d’elle et lui parler. Lui demander qui elle était… Tandis que la division lui importait désormais peu.

Il fit alors quelques pas supplémentaires et jugea qu’il était à la fois assez près d’elle pour lui parler et assez loin pour avoir le temps de se défendre en cas de signe d’hostilité de sa part… et finit par parler.

-Bien le bonjour. Quel est votre nom, je vous prie ?

Il la regarda fixement, attendant qu’elle lève au moins le regard, qu’elle tourne un peu la tête, pour croiser le sien. Ce serait pour lui la moindre des choses de reconnaître sa présence, son existence sur ces lieux. Lui répondre serait un nouveau pas, mais vu l’apparence froide que lui montrait cette personne à laquelle il avait demandé son nom, il doutait qu’elle en eût l’obligeance… Mais bon… Qui ne tente rien n’a rien, c’est bien connu… non ? Il eut ensuite l’idée d’ajouter une question à la suite de celle qui venait à l’instant de lui poser, mais il se ravisa. Cette question concernait directement la raison pour laquelle elle s’adonnait à une tâche telle que celle-ci, mais le doute et la légère crainte de n’avoir en retour qu’une réponse du genre ‘’Mêle-toi de tes affaires et va réfléchir dans ton coin ! Reviens me voir quand tu auras trouvé la solution tout seul comme un grand !’’ l’en dissuadèrent presque instantanément.

Il remplaça néanmoins cette question par une autre phrase qui ne comportait aucun point d’interrogation. Il lui confia ceci en espérant qu’elle aurait la bonne idée de lui donner en retour la base de son identité… :

-Pour ma part, je m’appelle Kazuo…

Il ne fut malgré tout cela pas assez fou pour lui donner son nom de famille. Le petit incident avec Katsuo lui avait clairement fait comprendre qu’utiliser un faux nom n’était pas non plus une merveilleuse idée. Se contenter de dire la vérité à moitié semblait pour lui la meilleure solution, désormais…

Kazuo remarqua que l’attitude de son interlocutrice avait changé. Son regard, son comportement… Un simple mot composé de cinq lettres, trois syllabes et constituant 50% du minimum de son identité avait suffi à cheveux bleus pour gagner au moins un petit intérêt de la part de cette fille. Il fallait dorénavant savoir si cet intérêt était plutôt positif ou, au contraire, plutôt négatif… et alors là, Kazuo allait encore devoir se servir de son sabre sans en avoir réellement l’intention… Mais ce n’était pas vraiment plus mal : il avait de toute manière décidé de s’entraîner plus intensivement en vue de la guerre qu’il pressentait arriver, alors il s’efforça de ne voir que le bon côté de choses. En tout cas, non seulement ce simple mot suffit à lui faire changer de comportement vis-à-vis de lui, mais aussi à lui faire deviner son nom de famille… Il était désormais populaire apparemment… Il ne sut vraiment comment le prendre sur le coup.

-Kazuo Kiriyama, en effet, répondit-il tout simplement.

Il ne sut si elle l’avait réellement entendu, si elle l’avait réellement écouté… Mais en tout cas, elle fit tout ce que Kazuo ne s’était attendu qu’à moitié à ce qu’elle fasse : elle prit bien soin de ne pas lui donner son nom, ou alors elle oublia ce retour. Elle se chargea plutôt de lui confier quelque chose qu’il craignait ne prendre plaisir à entendre… Mais en tout cas, pendant qu’elle lui faisait part de tout ça, elle déposa son butin et porta la main à son Zanpakutô.

Ce qu’elle lui révéla ? Tous les membres de la douzième division avaient apparemment reçu l’ordre du Capitaine Mayuri Kurotsuchi, ce scientifique fou et sadique avec qui Luffy avait fait ce deal absurde pour le protéger – ce qui, désormais il le savait, n’avait pas servi à grand-chose –, de l’abattre et ramener ses restes. Cette révélation lui tira un faible sourire. Un sourire surpris. Toutes les divisions s’étaient-elles donc mises en tête la bonne idée de le traquer ?

Le Capitaine Komamura devait savoir qu’il était en vie, ce qui faisat une division sur la liste… Avec son combat contre Katsuo, il savait maintenant que la seconde division l’avait dans sa liste noire, ça faisait deux… et maintenant la douzième, troisième division qui composait la liste. Peut-être qu’il en oubliait, mais cette petite complicité au départ accidentelle, voire tout à fait banale, avait fait de lui quelqu’un de négativement populaire aux yeux du Gotei 13.

-Tout le Gotei 13 a décidé de me traquer ? finit-il alors par s’étonner à haute voix. Ils n’ont pas lâché l’affaire, donc...

Tout en lui répondant, il se servit de son pouce pour extraire la lame de son Zanpakutô de l’intérieur de sa saya de quelques millimètres, voyant que son interlocutrice portait la main au sien, ce qui suffisait quelque peu à le mettre un peu plus sur ses gardes. Un peu plus qu’il ne l’avait été tout à l’heure. Il sortit également un peu sa main droite de sa poche et fit deux pas de plus en direction de cette inconnue. Dans son regard apparut alors une lueur de concentration, mais il renonça à adopter une expression trop sérieuse sur son visage éborgné.

-Je souhaite seulement te prévenir… Je ne désire pas me battre, mais si tu ne me donnes pas le choix… Ce sera regrettable mais j’en serais obligé.

Il n’avait toujours pas fait d’autre geste que celui de tout à l’heure avec le pouce pendant qu’il lui avait déclaré cette phrase que l’on pourrait qualifier d’avertissement, mais il se tenait prêt. Ce qu’il avait dit était un signe qu’il était prêt à se battre, sans en avoir l’intention, mais le fait de n’avoir fait que ce geste montrait clairement qu’il ne cherchait que la paix. Mais la trouverait-il… ?

-Seulement... Eclaire-moi, continua-t-il simplement. T'as-t-on donné l'ordre de m'arrêter et m'abattre, comme à certains combattants que j'ai déjà rencontrés, ou alors... ?

Elle ne lui répondit pas. Pour la deuxième fois. Et pour couronner le tout, il ne connaissait toujours pas son nom. Il commença à se demander s’il n’avait pas été un peu trop crédule de prendre les propos de cette personne au sérieux… Oh, et puis de toute façon, il n’en avait pas grand-chose à faire… que les divisions aient toutes décidé de le prendre en chasse ou de le laisser errer en liberté dans la nature du monde des vivants, il n’en avait plus vraiment grand-chose à faire. Komamura lui avait donné une leçon, il l’avait méritée. Il ne l’avait pas achevé, ce qui signifiait bien que ce n’était que partie remise… et l’exilé borgne y était maintenant pourrait-on dire quelque peu indifférent. En tout cas, il ne lâcha pas cette jeune inconnue du regard pendant qu’elle agissait. En effet, elle l’attaqua, et Kazuo eut le réflexe de dégaine à moitié son Zanpakutô. Oui, à moitié… son geste avait été interrompu par le fait qu’il ait réalisé qu’elle ne s’était pas tenue assez près de sa personne pour que la lame de son sabre ne le touche. Effectivement… l’attaque passa à quelques centimètres du torse de cheveux-bleus qui regarda le sabre sans ciller.

Son visage ne fut pas déformé par une émotion qui aurait échappé à sa vigilance pour apparaître sur son visage, mais en tout cas, il regarda celle qu’il pourrait maintenant appeler son adversaire… l’œil dans l’œil – ce qui lui permit de s’apercevoir qu’elle n’utilisait elle aussi qu’un œil sur deux et qu’elle n’avait pas vraiment réussi à s’y faire… était-ce récent ? Et était-elle vraiment aussi borgne que lui l’était ? – et laissa un faible sourire étirer ses lèvres. Il n’avait pas du tout l’intention de se moquer d’elle, comme elle semblait le craindre si l’on en croyait le teint rouge qu’avait pris son visage et le bafouillage qu’elle avait laissé échapper.

-Ne t’en fais pas, c’est normal, après tout. Je suis moi aussi borgne, alors je sais combien c’est difficile… lui confia-t-il alors pourtant sur un ton sincère, mais pourtant dénué de la moindre compassion, craignant qu’elle ne prenne mal ce bon sentiment.

Il jugea alors préférable de boucler son geste et dégaina entièrement Yôganfuro, bien entendue scellée, et dressa sa garde, pointant son arme en direction de la poitrine de celle qu’il pourrait appeler son adversaire dans les prochains instants si elle décidait de croiser le fer avec lui. Son sourire avait disparu et son visage était redevenu impassible, concentré sur sa cible et ses sens en alertes, surveillant le moindre de ses mouvements…

-En tout cas, tu n’as visiblement pas tenu compte de mon avertissement, si je me focalise sur ton geste.

Il fit un mouvement avec son sabre pour percuter celui de son adversaire avec sa lame, puis se glissa derrière elle d’un Shunpô après s’être assuré d’avoir suffisamment éloigné le Zanpakutô adverse de sa personne. Le sabre prêt à parer une éventuelle attaque, mais aussi à contre-attaquer, il lui mit une main sur l’épaule pour la tenir momentanément en respect – oui, momentanément – et glissa ensuite doucement à l’oreille sa question, pour la deuxième fois de leur rencontre.

-Je voudrais bien savoir, au fait, quel est ton nom… ?

Pendant qu’il parlait, il remonta doucement sa lame pour que celle-ci arrive à la tête de son interlocutrice et ainsi peut-être pouvoir l’assommer, et non la tuer… il positionna alors son sabre prêt de la tête de celle-ci, le dos de la lame tournée vers sa cible, en attendant la réponse.

Une réponse qu’il semblait vraiment vouloir se voir offrir.

Là encore, elle ne lui répondit pas. Elle saisit plutôt son sabre de sa main gauche, faisant ainsi voler ses intentions en éclats consistant à l’assommer après avoir obtenu le nom de cette mystérieuse personne. Il vit également dans le regard de la jeune fille qu’elle lui portait un intérêt soudain, mais quelque chose au fond de son être lui hurlait clairement qu’il ne fallait pas s’en sentir réellement flatté… Alors que la main avec laquelle elle avait empoigné sa lame commençait à saigner tant sa poigne était forte, amenant ainsi la peau de ses doigts à s’ouvrir sous le tranchant de l’acier, elle lui lança plutôt une réplique pourrait-on dire chargée d’ironie en lui disant qu’elle allait enfin lui donner son nom… avant de lancer une technique, comme si le nom de celle-ci était également le sien… cette techniques ? Du Kidô. La onzième du Hadô, précisément.

Kazuo, surpris, encaissa l’attaque sans avoir le temps de faire quoi que ce soit et la décharge électrique le fit tressaillir en lui arrachant une petite exclamation de surprise, mais aussi de douleur légère. L’écart entre elle et lui étant assez grand, la technique ne fut pas assez puissante pour l’assommer ou lui faire assez mal pour craindre ce combat ou commencer à envisager la fuite… Néanmoins, la décharge avait laissé un petit souvenir dans sa mémoire tant la surprise avait contribué à ce qu’il sente l’attaque l’atteindre et déferler en lui. Il fixa son adversaire du regard et se prépara à lui administrer une contre-attaque sans pour autant lui offrir la mort… elle ne lui en laissa pas le temps.

En effet, avant même que la simple idée de riposter ne lui traverse l’esprit, la Shinigami lui avait porté une attaque après avoir ouvert les doigts pour lâcher prise sur la lame du garçon aux cheveux bleus qui lui faisait face. Après le coup, il eut à peine le temps de porter la main à ses côtes asternales, se rendant compte que la texture de sa redingote, ainsi que celle de sa chemise blanche aux deux boutons du col détachés n’étaient que légèrement coupées par l’attaque au sabre de son adversaire, cette dernière se mit hors de portée d’une envisageable riposte de l’exilé borgne en un Shunpô, comme il l’avait fait précédemment, et le regarda avec une expression neutre sur le visage. Comme la première fois qu’il avait posé le regard sur elle. Elle se décida alors enfin à lui donner son nom : Sonohara. Ceci lui tira un sourire. Un sourire ne tirant pas vraiment son origine d’un quelconque sentiment, cette fois-là, et hocha doucement la tête.

-Sonohara, hein ? répéta-t-il. C’est un assez joli nom.

Mais, suite à ce prénom, elle lui fit bien comprendre que, comme il l’avait fait un instant auparavant, elle ne lui offrirait que la moitié de son appellation. Le sourire de Kazuo étira un peu plus ses lèvres fines, tandis qu’il fermait doucement les yeux pour les rouvrir, encore plus doucement. Il ne comprenait parfaitement ses raisons, même si une part infime de lui ne trouvait pas très juste que Sonohara connaisse son prénom ainsi que son nom de famille en raison de sa popularité particulière au sein du Gotei 13, alors que lui n’avait pas vraiment grand-chose pour découvrir la deuxième moitié de son identité. Cette part de lui fut toutefois assez petite pour que le balafré puisse la taire aisément… De toute façon, le monde n’était pas si petit que ça, il trouverait bien quelque chose pour la connaître un peu plus. Mais comme son but principal était d’acquérir un peu plus de puissance, il ne se permettrait pas de trop s’attarder sur la trouvaille de ce fameux nom. Autant dire qu’il laisserait faire le hasard, qu’il lui soit favorable ou non.

-Bien, se contenta-t-il alors de répondre, Je comprends tes raisons et je ferais avec. De toute façon, Sonohara est un nom assez bon à entendre pour me permettre de me passer de ton nom de famille jusqu’à ce que je le connaisse…

Avant qu’il ne puisse en dire plus, il fut quelque peu surpris par le geste qu’elle fit ensuite : elle rengaina son Zanpakutô. L’éborgné arqua un sourcil. Mais pourquoi donc faisait-elle cela ? Avait-elle abandonné le combat… ? Se sentait-elle trop inférieure à lui pour faire ne serait-ce qu’une petite tentative ? Il réfléchit alors quelques secondes et se rendit à l’évidence : elle avait déjà tenté quelque chose et, l’ayant seulement fait broncher, elle avait dû penser qu’il serait fou d’insister… Mais lorsqu’il croisa son regard, il comprit en un éclair que ce geste témoignait de beaucoup de choses, et il identifia parmi elles la bonne foi et l’abandon, accompagnés du fait qu’elle reconnaissait son infériorité, mais aussi son respect.

Il hocha alors doucement la tête.

-Alors, c’est maintenant que nous nous séparons… ? Eh bien ce fut un plaisir d’avoir cet échange avec toi… Sonohara.

Sans dire un mot de plus, il se retourna et esquissa un geste pour se retirer de cet endroit pour la laisser poursuivre son activité. Vu comme il lui tournait le dos, elle ne pouvait pas voir qu’il souriait en fermant son œil restant, signe qu’elle avait elle aussi gagné son estime.

-Ah, et au fait ! Bonne cueillette ! lui lança-t-il sur un ton qu’il voulut amical.

Lorsque l’appel de Sonohara parvint à ses oreilles, il arrêta tout net sa marche. Il resta bien droit, ses bras dans la même position que d’habitude – ce qui incluait sa main droite dans la poche et sa main gauche sur cette fameuse zone de la saya de son arme –, le regard dirigé tout droit devant lui… Un simple spectateur aurait pu croire que ce simple mot avait élevé une sorte de mur invisible dont Kazuo avait soupçonné l’existence à cause d’une hypothétique percussion qui ne s’était bien entendue jamais passée. En tout cas, il se retourna doucement vers la femme Shinigami, le visage neutre, mais la surprise pouvant facilement se lire dans ses yeux. Le ton avec lequel elle avait prononcé ce mot pour le freiner… il lui paraissait étrange. Etrange avec les abords froids de son interlocutrice. Un contraste, voilà ce qu’il trouvait dans tout ça.

Il cessa toutefois de se poser des questions sur cette opposition pour le moins surprenante et rebroussa chemin pour s’approcher derechef de Sonohara qui avait l’air quelque peu gênée… Qu’avait-elle à lui demander qui mettait autant en cause son amour-propre (ou du moins c’était ce que Kazuo pensait) ? Pendant qu’il se dirigeait une nouvelle fois vers cette personne, cette dernière regarda autour d’elle pour vérifier que personne n’était à proximité, puis elle s’adressa de nouveau à lui en désignant son sabre. Elle lui confia alors qu’elle n’arrivait pas à manier cette arme blanche correctement, avec le visage écarlate. Kazuo devina qu’elle avait un peu honte de lui confier ça. Etait-ce parce qu’il était un Shinigami exilé ? Très probable… Mais en tout cas, il ne voyait pas pourquoi elle devrait avoir honte… Il était peut-être un exilé, mais un Shinigami comme elle, et puis ils étaient tous les deux des êtres humains sous forme d’esprits… sous forme de Dieux de la Mort. Il lui sourit amicalement.

-Les difficultés que tu éprouves à manier cette arme proviennent tout d’abord de son poids que tu supportes difficilement, non ? commença-t-il. Lorsque tu m’as attaqué pour la première fois, j’ai cru voir de mon œil restant que tu ne trouvais pas cette arme très légère… On peut être un excellent sabreur, avoir des poignets, des bras souples… Si l’arme est trop lourde pour le manieur, tout est mis en difficulté… Ou du moins c’est comme ça que je le perçois. Il faut seulement que tout soit harmonieux, que rien ne manque… Je ne sais pas si je suis assez clair.

Et alors qu’il ne se trouvait maintenant plus qu’à un ou eux mètres de Sonohara, celle-ci lui avoua que, contrairement à ce qu’elle lui avait affirmé il y a un instant, la Soul Society n’accorde maintenant qu’un intérêt minime pour les Shinigamis exilés. Cette nouvelle lui fit arquer légèrement un sourcil, tandis qu’un énième sourire étira ses lèvres fines.

-En voilà une bonne nouvelle… ! fit-il alors. Je vais pouvoir profiter d’un peu de paix, donc ! Bref… Blagues à part.

Il dégaina derechef son propre sabre et le tint devant lui en faisant des moulinets souples réalisés à l’aide des mouvements flexibles de son bras et de son poignet devant les yeux de son interlocutrice. Il arrêta ensuite ces moulinets pour s’adresser de nouveau à elle.

-J’arrive à faire ça car le poids de mon sabre s’accorde avec ma force. Et puis il faut aussi s’entraîner à manier ce genre d’objet… – il se tourna vers elle et désigna son voile blanc – et j’ajoute aussi que tes difficultés à te familiariser avec ton champ de vision divisé par deux joue un rôle dans ta difficulté à manier ton Zanpakutô.

Il mit le dos de la lame de son sabre sur son épaule pour faire une proposition à Sonohara, suite à ses instructions qu’il fallait remplacer par les actes selon son point de vue…

-Si tu y consens, je te propose un petit duel, histoire de t’aider à analyser tes propres difficultés et leurs origines… pour les transformer en avantages.

Il haussa les épaules en lui lançant un regard amical.