Enfin sorti de cette fichue forêt ! [Ready to rock !]

Gotei, sweet Gotei

Légende : Détenu, Hisagi Shuuhei

Clic, clic

Les deux mains menottées et enchaînées butaient l'une contre l'autre, et parfois toutes deux contre la chaîne qui ceinturait leur propriétaire. Les mains étaient noircies par la crasse, et parsemées de marques rouges. Ce rouge évoquait des brûlures et des entailles causées par un combat. Mais vu l'état de ces mains, n'importe qui se demanderait s'il ne s'agissait pas là d'une guerre, car très peu de combats singuliers peuvent mettre dans un tel état.

Clic, clic

Les pieds se succédaient péniblement l'un devant l'autre, et la chaîne qui les reliait faisait un véritable raffut. Inutile de préciser que le marcheur enchaîné devait avoir un beau mal de crâne. Entre ses blessures, la fatigue, et les cliquetis incessants. Les pieds avaient tout autant souffert que les mains, ce qui était d'autant plus inquiétant. Les bottes recousues avec les moyens du bord un nombre incalculable de fois, le bas de son uniforme shinigami dans un état déplorable; même le Zanpakutô à la ceinture était détérioré au niveau de la garde.

Clic, clic

Son escorte s'arrêta enfin devant une porte coulissante, faite de papier et de bois. Traditionnel élément de décor des habitations et bureaux shinigamis, ces portes simples au demeurant étaient très élégantes. L'homme enchaîné esquissa un sourire nostalgique, ces bureaux lui avaient presque manqué ... presque. En tout cas, ce qui était sûr, c'est qu'il les aurait nettement plus apprécié sans cet accueil pour le moins ... original.

Le shinigami à sa droite pressa donc le côté gauche de la porte, en saisit l'extrémité de bois, puis poussa le tout vers la droite pour ouvrir. Sur son épaule, le prisonnier put apercevoir un ornement fait de bois avec un symbole gravé dessus. Juste sous un motif était inscrit "Neuvième division". A quoi pouvaient-ils bien servir déjà ceux-là ? Sans avoir plus de temps pour observer ni réfléchir, il fut tapoté dans le dos en guise d'incitation à avancer dans la pièce suivante par son deuxième shinigami d'escorte.

*C'est déjà mieux que de me faire botter le dos à grands coups de savates en bois ...*

Il acquiesça donc, puis avança paisiblement jusque dans l'autre pièce, où un homme était assis en tailleur face à une table basse. Deux tasses de thé étaient posées là, et la fumée qui s'en échappait indiquait qu'ils venaient d'être servi. Les tasses taillées dans des plantes que le détenu ne saurait identifier coloraient la pièce de leur vert éclatant. Quelques papiers étaient également posés sur la table, le formulaire de rapport sans doute. L'homme assis avait les yeux plissés, et fixait le mur sans dire un mot. Visiblement en pleine réflexion, il leva la main gauche et en présenta la paume aux trois nouveaux arrivants pour leur dire "stop". Les deux escorteurs et leur colis se figèrent instantanément, ce qui permit à ce dernier de mieux regarder la pièce.

L'homme qui réfléchissait était clairement gradé, sans toutefois être le leader de la division. Ses cheveux très noirs étaient en bataille, et trois cicatrices ornaient le côté droit de son visage du front à la mâchoire. Une espèce de décoration, entre le ruban adhésif et le pansement, était collée de manière à longer horizontalement son visage, et ce de son nez à son oreille gauche. Enfin, sous ce fameux élément collé se trouvait un tatouage "69". Le prisonnier ne comprenait rien à ces motifs, mais trouva amusante la tenue des shinigamis de cette époque. Il avait été coincé durant plusieurs siècles, étaient-ils tous comme ça désormais ? Et Yamamoto, le capitaine commandant, se pavanait-il lui aussi dans une tenue loufoque désormais ?

La main gauche du shinigami bariolé s'abaissa, puis il se leva pour saluer les trois nouveaux arrivants. Pointant la chaise en face de la sienne du doigt, il invita le détenu à s'asseoir et prendre le thé. Ceci pourrait paraître déplacé, mais compte tenu des circonstances, impossible de faire une réflexion. Après un soupir amusé, il s'assit en tailleur face à celui qui allait l'interroger.

- Hisagi Shuuhei, lieutenant de la neuvième division du Gotei treize. Dit-il, s'inclinant à nouveau.

*Les nouveaux ont une tenue étrange, mais ils ont le respect des aînés* Pensa le prisonnier, avec un léger sourire.

- Ashido Kano, dernier survivant d'une escouade chargée des rondes aux extrémités du Gotei 13.

Le lieutenant jeta un œil rapide sur ses papiers, comme s'il y cherchait une information manquante. Visiblement bredouille, il reprit d'un ton sérieux :

- Avez-vous, vous et votre escouade, déserté ?

Ses yeux aussi perçants que les flèches d'un Quincy, il scrutait jusqu'au moindre mot ou geste capable de trahir Ashido.

- Pour être tout à fait franc avec vous, non. Nous faisions notre ronde comme à notre habitude, jusqu'à ce qu'un Garganta ne s'ouvre; les hollows en surgissaient par dizaines. Grâce aux efforts réunis de tous les shinigamis sur place, nous les avons aisément et rapidement repoussé. Malheureusement, dans un excès de zèle, mon équipe et moi-même les avons poursuivi par le portail, et avons atterrit dans leur territoire. Autrement dit, en plein cœur de la forêt Menos, qui se situe juste en dessous du désert du Hueco Mundo. Mes compagnons furent massacrés les uns après les autres par les hollows en quelques minutes à peine. Comme vous vous en doutez, je suis le seul à avoir réussi à m'en sortir.

Kano baissa les yeux vers le tapis brodé qui servait de couvre-sol. Son cœur se pinçait cruellement à chaque fois qu'il parlait de la mort de ses compagnons.

- Bien, j'ai effectivement dans mon rapport une attestation disant que vous et vos hommes avez foncé tête baissé par le portail. Comme vous le savez, nous n'avons pas pu risquer d'envoyer des secours sans savoir où ils mettraient les pieds. Je suis vraiment désolé, pour vos compagnons comme pour votre interminable séjour dans cet enfer.

Le lieutenant avait une teinte émue, respectueuse, voire amicale dans la voix. Il semblait compatir et vouloir aider le shinigami détenu, ce qui ne manqua pas de toucher ce dernier.

- Je comprends, mais ce n'est la faute de personne, mis à part la mienne. Moi, qui ai été assez stupide pour foncer dans la gueule du loup, y perdre mes hommes, et y rester coincé durant des siècles. Je vous ferai volontiers un rapport détaillé sur la forêt Menos et sur le Hueco Mundo, je pense même pouvoir vous en faire une carte. Mais avant cela, j'aimerais pouvoir me reposer un peu, plusieurs siècles sans un vrai lit, vous comprenez ...

Hisagi sourit tristement, puis se tourna légèrement vers les deux shinigamis d'escorte :

- Le voyage s'est-il bien passé ?

Les deux acquiescèrent de la tête, l'air très approbateur.

- Bien. Enlevez lui ses chaînes, je vous prie.

Les soldats s'exécutèrent, puis rangèrent le tas de ferraille dans une pièce voisine. Ashido se frottait les avant-bras, pour s'enlever la désagréable sensation que laissent des menottes une fois enlevées.

- Je suppose que je dois vous remercier ?

- Inutile, vous avez bien assez souffert comme ça. Et puis dans votre état, vous n'êtes pas bien dangereux.

Il était vrai que le shinigami faisait peine à voir, tant par sa tenue en lambeaux que par l'expression de son visage.

- En effet. D'autres questions avant que je n'aille dormir pour quelques jours ?

Shuuhei sourit à nouveau, jeta un nouveau regard à sa feuille, puis releva la tête pour répondre :

- Une seule qui me semble ne pas pouvoir attendre. Comment êtes-vous parti du Hueco Mundo pour revenir ici après tout ce temps coincé sans le moindre échappatoire ?

Ashido sourit à son tour, puis renchérit :

- Hé bien, disons que les temps qui courent ont l'air plutôt agités, du coup les Menos ont été appelés à se battre je ne sais où; des passages ont donc été installés par Las Noches pour leur permettre d'en sortir, de se réunir, puis d'aller au combat. Comme j'ai demandé gentiment, on m'a laissé passer.

- Ces passages mènent donc au désert ?

- Tout à fait. De là-bas, j'ai "emprunté" un Garganta destiné à un groupe de hollows pour arriver dans le monde réel. La suite vous la connaissez sûrement, puisque je me suis livré au shinigami en charge de surveiller la ville où j'ai atterri, et que c'est lui ainsi que vos deux soldats ici présents qui m'ont amené jusqu'ici. Je ne peux donc que bénir les passages des hollows, ainsi que ma chance.

Le lieutenant écrivait à toute vitesse ce que lui racontait son interlocuteur, il s'agissait visiblement d'une information de première importance pour lui.

- Y a-t-il une guerre ? Demanda Ashido, inquiet.

- J'ai bien peur que ça ne soit encore pire que cela, Kano-san. Mais ne vous en faîtes pas, nous vous appellerons et vous expliquerons tout en temps voulu. D'ici là, je pense que vous avez suffisamment enduré pour mériter du repos. Mes hommes vont vous conduire dans les quartiers de la quatrième division, où des soins et de la nourriture vous seront apportés. Restez-y jusqu'à mon signal.

Ashido se releva, rempli d'une joie immense. C'était enfin fini, enfin fini ces années de solitude, à ne parler qu'à des hollows qui ne demandaient qu'à le dévorer vivant. Fini les ténèbres de cette sombre forêt maudite, il vivrait enfin à nouveau dans la lumière. S'inclinant autant que ses blessures le lui permettaient, il tourna les talons pour se placer entre les deux soldats, puis dit d'un ton des plus enthousiastes :

- Sachez qu'un jour, je vous revaudrai cette confiance que vous venez de m'accorder, Shuuhei-sama. Et croyez moi, je n'ai qu'une parole.

Le soldat Kano avança donc vers la quatrième division avec son escorte, et sachant qu'il serait sous haute surveillance jusqu'à ce qu'il soit estimé digne de confiance, y resta un moment pour se reposer. Malheureusement, il était de retour dans une période de guerre, où des vacances n'étaient pas possible, même pour lui qui revenait de si loin. Il répondit scrupuleusement et dans les moindres détails aux shinigamis qui venaient recueillir des informations sur le Hueco Mundo et la forêt, afin de prouver qu'il était toujours des leurs.

*Les ennuis ne font que commencer ... Mais ce n'est pas en s'en lamentant que l'on ramènera la paix*